Game Over

Quand l'écran titre du jeu s'intitule Game Over, le ton est donné...

Quand l’écran titre du jeu s’intitule Game Over, le ton est donné…

 

« Dans une autre galaxie, très loin d’ici, dans un autre temps »… Bon, si ça vous rappelle quelque chose, je n’y suis pour rien : je cite la notice du jeu. Toujours est-il que Arkos est bien résolu à mettre fin à la mégalomanie de Gremla, en usant nous dit-on de « toute son habileté et sa ruse ». Ce qui, en termes de jeux vidéos, signifie foncer droit devant soi en tirant dans le tas.

 

Game Over est loin d’être un inconnu dans le paysage des jeux vidéos des années 80, notamment grâce au dessin (magnifique) de sa jaquette laissant entrevoir, comble de toutes les audaces, un vague bout d’aréole. Inutile de dire qu’en 1987, alors que l’on pouvait voir un strip-tease en prime time toutes les semaines dans Cocoricocoboy, l’affaire fit scandale.

 

Au-delà de ce psycho-drame typique des années 80, et terriblement proche de ce à quoi nous assistons presque tous les jours sur Facebook et Twitter à propos de tout et n’importe quoi, Game Over rencontra un certain succès. Il demeura cantonné toutefois aux ordinateurs 8 bits dominants de l’époque : le Commodore 64, l’Amstrad CPC, le Spectrum… et le Thomson.

 

Le tout premier tableau du jeu. L'ambiance gothique (et austère) est donnée.

Le tout premier tableau du jeu. L’ambiance gothique (et austère) est donnée.

 

Le jeu se divise en deux niveaux, basés sur un principe similaire: votre personnage avance de tableaux en tableaux, en tirant sur les ennemis, en évitant leurs projectiles, en sautant par moments de plateformes en plateformes, en ramassant des options et en affrontant des boss de milieu ou de fin de niveaux. Le deuxième niveau est cependant moins linéaire, offrant plusieurs chemins possibles et demandant, semble-t-il, un enchaînement de manœuvres.

 

Rien de plus simple, me direz-vous. Certes, vous faites bien de me le dire, mais il n’y a parfois rien de plus compliqué que la simplicité. En l’occurrence, Game Over porte fort bien son titre, puisque c’est un message auquel vous serez fréquemment confrontés en y jouant. Au passage, on admirera la paresse des développeurs qui choisissent d’appeler leur jeu Game Over. Et pourquoi pas Player 1 Press Start ? Ou Playerunknown’s Battleground ?

 

Parmi mes ennemis préférés, ces espèces de Bigfoot au visage boudeur.

Parmi mes ennemis préférés, ces espèces de Bigfoot au visage boudeur.

 

Game Over est un jeu difficile, et sa version Thomson ne fait pas exception à la règle. À vrai dire, encore une fois, la faiblesse de son portage contribue fortement à compliquer la chose. Pourtant, s’il est nettement moins maniable et moins beau que, par exemple, sa version CPC, Game Over n’est pas non plus une adaptation aussi horrible que celle de Yie ar Kung-Fu 2 ou de Green Beret.

 

Le jeu ne manque ainsi pas de fluidité : votre personnage évolue à une vitesse convenable, de même que ses adversaires, et ne souffre d’aucun ralentissement. De fait, nous sommes en présence d’un jeu d’arcade nerveux, loin de certaines productions lambines ou saccadées.

 

Pour autant, la physique des mouvements du héros n’est pas toujours des plus adaptée pour éviter les nombreux projectiles dont il se fait copieusement arroser. Sans des bonus de protection temporaires astucieusement disponibles dès les premières secondes du jeu, Game Over serait en réalité injouable, la barre de vie du héros diminuant à une vitesse folle. Au-delà de l’agilité du joueur, c’est bien la position (aléatoire) de ces bonus qui déterminera la progression dans le premier niveau du jeu.

 

Le bosse de milieu de premier niveau surprend par sa taille. Sinon, il se déplace en sautillant. Tout de suite, c'est moins crédible.

Le boss de milieu de premier niveau surprend par sa taille. Sinon, il se déplace en sautillant. Tout de suite, c’est moins crédible.

 

Pour sa part, le deuxième niveau est paradoxalement plus accessible. Les ennemis y sont en nombre plus raisonnable, permettant souvent de mieux anticiper et mieux éviter leurs balles. Quand elles ne se fondent pas dans le décor pour devenir quasiment invisibles, le jeu de couleurs des tableaux étant pour le moins sommaire.

 

Mais je précise quand même que, plus jouable ou pas, ce deuxième niveau n’en demeure pas moins particulièrement retors et qu’il m’a été rigoureusement impossible de le finir, ou même de comprendre comment on pouvait le finir.

 

Car Game Over manque sensiblement de lisibilité, de par sa conception comme ses bugs. Sa mécanique de sauts est de loin ce qui m’a fait le plus rager. Il n’est ainsi pas rare, en voulant sauter sur une plateforme ou simplement passer une marche, de traverser sans raison le décor pour tomber dans le vide.

 

Les choix de couleurs et de textures nuisent parfois légèrement (c'est un euphémisme) à la lisibilité du jeu.

Les choix de couleurs et de textures nuisent parfois légèrement (c’est un euphémisme) à la lisibilité du jeu.

 

Ce genre de problématiques est encore plus agaçant lorsque, dans le deuxième niveau, un élément de décor fait obstacle au personnage… sauf s’il saute depuis un point précis, lui permettant de passer au travers. Et cela sans qu’il soit possible de savoir s’il s’agit d’un glitch ou d’un choix de gameplay. Ou, pire encore, d’un choix de gameplay induit par un glitch.

 

Et le deuxième niveau en question est empli de choses dans ce genre : zéro indice sur le chemin à prendre, des sculptures que l’on peut détruire et d’autres non sans savoir l’utilité de la chose, un bonus de protection qui ne protège finalement de rien, des murs que l’on peut passer dans un sens mais pas dans l’autre…

 

Même en regardant une vidéo d’un joueur finissant le jeu sur C64, je n’ai pas pu reproduire son chemin. Et j’ignore en réalité, quand bien même j’admets volontiers ne pas être le joueur du siècle, si Game Over est vraiment conçu pour être finissable dans sa version Thomson. Si quelqu’un y est arrivé, qu’il me fasse signe et me dise comment il a fait, je serais plus que curieux et ravi d’avoir son retour d’expérience !

 

Robot, c'est trop !

Robot, c’est trop !

 

Le soft a au moins l’avantage de nous propulser dans des décors à la fois antiques et futuristes, palais aux grandes colonnes baroques peuplés de robots volants ou de monstres étranges dont la variété est louable. On est également content de progresser vers d’autres types d’atmosphère, de voir vite fait un peu de nature et d’affronter des boss gigantesques.

 

Comme je l’ai dit précédemment, le jeu n’est pas très beau, à cause notamment de la pauvreté de sa palette qui nuit parfois à la lisibilité même de l’action. Pas question pour autant de considérer qu’il est atrocement moche, ses personnages sont bien dessinés et distincts, ils ont de la personnalité et participent à une ambiance générale. Pour ce qui concerne la partie sonore, comme souvent, on se contentera de quelques bruitages épars sans grand relief.

 

Des espèces d'autruches kangourous vous agressent au début du second niveau. Ne réglez pas votre téléviseur.

Des espèces d’autruches kangourous vous agressent au début du second niveau. Ne réglez pas votre téléviseur.

 

Ce qui me trouble, c’est que je garde beaucoup de souvenirs de Game Over, clairement un jeu qui a marqué mes années Thomson. Et au final, presque sans m’en rendre compte, je signe un billet plutôt négatif sur un jeu qui n’en demeure pas moins, malgré ses bugs et ses errements, un moment sympathique à passer. Et auquel j’ai pris plaisir, même brièvement, à revenir dessus.

 

En réalité, le jeu aurait pu être bien meilleur :le gros du portage a clairement été réalisé dans des conditions valables, et les défauts dont il souffre auraient pu être corrigés. Et c’est sans doute cela qui me frustre le plus, car Game Over n’a rien d’une catastrophe industrielle, mais apparaît difficile d’accès, voire carrément injouable par moments, faute d’attention sur des finitions essentielles.

 

Faute de pouvoir montrer le tout dernier du jeu, je triche avec les trois boss de fin du premier niveau.

Faute de pouvoir montrer le tout dernier du jeu, je triche avec les trois boss de fin du premier niveau.

13 comments

  1. Loz dit :

    Une bosse de fin de niveau ? C’est encore un coup d’écriture inclusive ?

  2. Turk182 dit :

    Superbe article! Je t’accompagne dans ton analyse, la version TO du jeu est vraiment très moche comparée avec celle de ses grands frères que sont l’Amstrad CPC et le Commodore 64. Même la version Spectrum était plus jolie 🙂
    C’est dommage car les Thomsons étaient d’excellentes machines, peut être mal exploitées à l’époque.

  3. Stan dit :

    Excellent article où tu mets en lumière les problèmes de la version Thomson. La difficulté est en effet importe mais c’est surtout les problèmes de lisibilité de cette version qui plombent un peu le soft. C’est dommage, finalement, d’avoir voulu trop en faire (des fonds unis à la 5ème axe auraient accéléré l’affichage en plus de rendre l’action lisible).
    Je sais que le jeu est possible à terminer sur Thomson. Pour ma part, je le finissais sans tricher sur CPC et je me souviens collaborer avec mon pote qui le possédait sur Thomson et tenter de le guider dans la dernière partie du jeu jusqu’au Game Over final.
    A noter que l’illustration de la jaquette n’est pas exclusive au jeu mais à également été utilisée en couv’ du magazine français Ere Comprimée. Elle est signée Royo.

    • Le Thomsonaute dit :

      Bonjour Stan, merci pour ces précisions. Je suis content de voir des témoignages indiquant que le jeu est techniquement bel et bien finissable. j’espère vraiment à présent pouvoir voir cela de mes yeux un jour, ne serait-ce que par curiosité. Encore que je doute que la moindre animation spéciale ait été prévue pour cette fin, mais après tout… ! 🙂

  4. HP dit :

    Merci pour cet article ! Que de souvenirs pour moi aussi, Game Over est un des jeux sur lequel j’ai passé pas mal de temps à l’époque. C’est vrai qu’avec le recul il y avait une certaine recherche dans le design des créatures et des décors, ainsi qu’une jaquette mémorable évidemment 🙂 Une suite sortira en 1987 sur de nombreuses machines mais pas sur Thomson cette fois.

    Mis à part cet espèce de lag lors des déplacements (les sauts surtout !) la version Thomson est correcte même s’il aurait été possible de faire beaucoup mieux…

  5. Jice dit :

    Merci pour cet article qui me rappelle d’excellents souvenirs !

  6. Fonf dit :

    Un jeu qui me rappel avec bonheur mes années TO8D.

    Même si maintenant je sais pertinemment que ce jeu était moisi, je ne peut m’empêcher d’en garder un excellent souvenir. Ce jeu m’émerveillait à l’époque, je ne peux donc pas le détester.

    Mais je n’aurai jamais le courage de me remettre dessus.

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